Monthly Archives: September 2025

Comment les grandes choses se réalisent… ou échouent

J’ai récemment lu How Big Things Get Done de Prof. Bent Flyvbjerg et Dan Gardner. C’est un livre fascinant, à la fois érudit et accessible, qui plonge dans le monde des grands projets d’infrastructure. Dans cet ouvrage, les auteurs analysent une base de données comprenant plus de 16?000 projets, et démontrent, à l’aide de statistiques, que la plupart d’entre eux dépassent leur budget et leur échéancier, parfois de manière spectaculaire.

(English Version : https://www.linkedin.com/pulse/comment-les-grandes-choses-se-r%25C3%25A9alisent-ou-%25C3%25A9chouent-benoit-marcoux-lsibe/)

Je n’ai jamais dirigé de mégaprojet de l’ampleur de ceux décrits dans le livre. Le plus grand projet dont j’ai eu la responsabilité atteignait environ cent millions de dollars. C’est déjà imposant pour une équipe, mais bien loin des dizaines de milliards des projets de barrages, de centrales nucléaires ou des Jeux olympiques étudiés par Flyvbjerg. Cela ne m’a pas empêché d’être curieux de voir ce que je pourrais en tirer, et j’y ai trouvé des enseignements applicables, même à plus petite échelle.

Le constat n’est pas que tout est condamné à l’échec, mais que certains types de projets réussissent beaucoup mieux que d’autres. Les messages clés sont clairs : la modularité est puissante et il faut penser lentement, agir rapidement. Lorsqu’un projet peut être découpé en modules répétitifs et standardisés, comme c’est le cas pour le solaire ou les batteries, les risques chutent. À l’inverse, les projets uniques, massifs et fortement innovants, comme les grands barrages hydroélectriques ou le nucléaire, accumulent les dangers de dépassements. Flyvbjerg note qu’un pourcentage d’entre eux sont des projets à «?fat tail?», dont la distribution des risques est asymétrique : la partie droite de la courbe est plus lourde que dans une distribution normale, ce qui accroît fortement la probabilité de dépassements extrêmes de coûts ou de délais.

Intrigué, j’ai voulu voir où se situe Hydro Québec dans ce portrait. Mon intuition était que l’entreprise faisait mieux que la moyenne mondiale, car elle a construit en série des barrages pendant des décennies, accumulant une expertise institutionnelle rare. L’analyse des nouvelles centrales mises en services dans les 25 dernières années confirme cette intuition : alors que la moyenne mondiale des dépassements pour les barrages est d’environ +75 % dans la base de données de Flyvbjerg, le bilan d’Hydro-Québec apparaît beaucoup plus modéré.

La centrale Sainte-Marguerite-3, mise en service en 2003, avec ses innovations risquées (grands groupes turboalternateurs assemblés sur place, construction souterraine), a connu de graves difficultés techniques et fût l’un des projets le plus ardus des dernières décennies. Les sources publiques indiquent un coût de construction d’environ 2,5 milliards de dollars, pas très au-dessus de l’estimation initiale, car plusieurs déficiences étaient sous garantie, mais la mise en service a été retardée de 2 ans par rapport à l’échéancier et les problèmes prolongés ont fait en sorte que la pleine capacité n’a été atteinte qu’en 2007, suivie d’un nouveau bris en 2009. Ces retards ont créé un coût d’opportunité, puisque l’électricité attendue n’a pas pu être livrée. Selon les hypothèses sur la production perdue et les prix de l’électricité, ce coût d’opportunité pourrait atteindre quelques centaines de millions de dollars, un dépassement qui n’apparaît pas dans les comptes de construction, mais qui reste limité à environ 20 ou 25 % du coût de construction, largement moins que la moyenne des dépassements calculée par Flyvbjerg.

Pour des centrales comme Eastmain-1A et Sarcelle (mises en service entre 2011 et 2013) et Romaine-1 à -3 (mises en service entre 2014 et 2017), l’information sur les coûts est moins précise, mais aucun écart majeur n’a été rapporté.

Le projet Romaine-4, mis en service en 2022, en retard d’un an, a été plus difficile, avec des difficultés techniques (comme la friabilité du roc) et la pandémie de COVID-19. Le coût total de la réalisation du complexe de la Romaine s’est élevé à 7,4 milliards de dollars, soit seulement 14 % de plus que l’estimation initiale. Cependant, Romaine-4 a été la principale cause des dépassements de budget.

Globalement, la performance d’Hydro-Québec est bien meilleure que la moyenne mondiale pour la catégorie hydroélectrique de Flyvbjerg, même en incluant les projets difficiles qu’ont été Sainte-Marguerite-3 et La Romaine-4.

Cette particularité québécoise est probablement due à ce qu’on appelle l’«?effet de série?» : sept nouvelles centrales ont été mises en service au cours des 25 dernières années. Quand les ingénieurs passent d’un chantier à l’autre, la mémoire organisationnelle compense une partie du risque. Cet effet de série s’étend aussi à la chaîne d’approvisionnement, solide au Québec, avec des turbiniers (Voith Hydro, ANDRITZ Hydro, GE Vernova, Litostroj Hydro) et de grands entrepreneurs (comme Pomerleau), appuyés par un écosystème complet de manufacturiers internationaux (comme Hitachi Energy et Schneider Electric) et de nombreuses PME locales. Cet écosystème encore trop méconnu du grand public est l’un des joyaux industriels du Québec et un facteur clé du succès d’Hydro-Québec. Il faut toutefois rappeler que le risque de dépassement demeure réel, et que les projets d’Hydro-Québec ne sont pas à l’abri. Ce risque pourrait même croître avec le ralentissement probable du rythme de construction, même si une partie de l’expertise est appelée à perdurer grâce aux travaux de réfection déjà en cours sur les centrales existantes.

Le contraste est quand même frappant avec les projets solaires, qui affichent dans la base de Flyvbjerg des dépassements pratiquement nuls. Ces technologies, qui sont intrinsèquement modulaires, faciles à mettre en œuvre et prévisibles en termes de coûts, doivent être intégrées à l’arsenal québécois. Développer une expertise locale dans ces filières n’est pas un luxe : c’est une nécessité si l’on veut maîtriser les risques tout en répondant aux besoins d’électrification.

How Big Things Get Done se lit à la fois comme un avertissement et comme un guide pratique. Le Québec a bâti son histoire énergétique sur des mégaprojets hydroélectriques qui l’ont distingué dans les statistiques mondiales. Pour l’avenir, il faudra sans doute conjuguer cette tradition avec l’esprit de modularité du solaire et du stockage. Penser lentement, agir rapidement — et choisir les bons outils pour les grandes choses à venir.

How big things get done… or fail

I recently read How Big Things Get Done by Prof. Bent Flyvbjerg and Dan Gardner . It’s a fascinating book, both scholarly and accessible, that dives into the world of large infrastructure projects. The authors analyze a database of more than 16,000 projects and demonstrate, with data, that most exceed their budgets and schedules, sometimes dramatically.

(LinkedIn Version: https://www.linkedin.com/pulse/how-big-things-get-done-fail-benoit-marcoux-ti0re/)

I have never directed a megaproject on the scale described in the book. I led a team on a project worth over $100 million. While this was a significant endeavour, it paled in comparison to the billions invested in projects such as dams, nuclear power plants, or the Olympic Games, as analyzed by Flyvbjerg. Still, I was curious to see what I could take away, and I found lessons that apply even at smaller scales.

The point is not that everything is doomed to fail, but that some types of projects succeed much more often than others. The key messages are clear: modularity is powerful and think slow, act fast. When a project can be broken into repetitive, standardized modules—as is the case for solar or batteries—risks drop sharply. In contrast, unique, massive, and highly innovative undertakings, like hydroelectric dams or nuclear plants, accumulate risks of cost and schedule overruns. Flyvbjerg notes that a percentage of these are “fat tail” projects, where risk distributions are skewed: the right side of the curve is much heavier than in a normal distribution, making extreme cost or time overruns far more likely.

Intrigued, I wanted to see how Hydro Québec fits into this picture. My intuition was that the company performs better than the global average, because it has built dams in series for decades, accumulating rare institutional expertise. An analysis of new plants commissioned in the past 25 years confirms this intuition: while the global average overrun for dams is about +75% in Flyvbjerg’s database, Hydro-Québec’s record appears much more moderate.

Sainte-Marguerite-3, commissioned in 2003, with its risky innovations (large turbine-generator units assembled on site, underground construction), faced serious technical difficulties and was one of the toughest projects of the past few decades. Public sources indicate a construction cost of about $2.5 billion, not far above the original estimate, since many deficiencies were under warranty. But commissioning was delayed by two years, and extended problems meant that full capacity was only reached in 2007, followed by another breakdown in 2009. These delays created an opportunity cost, since the expected electricity could not be delivered. Depending on assumptions about lost output and electricity prices, this opportunity cost could amount to several hundred million dollars—a hidden overrun not reflected in construction accounts, but still limited to about 20 to 25% of construction costs, well below the average overruns measured by Flyvbjerg.

For plants like Eastmain-1A and Sarcelle (commissioned between 2011 and 2013) and Romaine-1 to -3 (commissioned between 2014 and 2017), cost information is less precise, but no major overruns have been reported.

Romaine-4, commissioned in 2022, was more difficult, with technical challenges (such as friable rock) and the COVID-19 pandemic. The total cost of the Romaine complex reached $7.4 billion, only 14% above the initial estimate. Romaine-4 was the main cause of that overrun.

Overall, Hydro-Québec’s performance is far better than the global average for hydro projects in Flyvbjerg’s database, even when including challenging projects such as Sainte-Marguerite-3 and Romaine-4.

This Québec exception is likely explained by the “series effect”: seven generating stations were commissioned in the last 25 years. When engineers move from one site to the next, organizational memory offsets part of the risk. The series effect also extends to the supply chain, strong in Québec, with turbine manufacturers (Voith Hydro, ANDRITZ Hydro, GE Vernova, Litostroj Hydro) and major contractors (such as Pomerleau ), supported by a complete ecosystem of international manufacturers (such as Hitachi Energy and Schneider Electric) and numerous local SMEs. This ecosystem, still too little known to the public, is one of Québec’s industrial jewels and a key factor in Hydro-Québec’s success. Still, the risk of overruns remains real, and Hydro-Québec’s projects are not immune. This risk may even grow as the pace of new construction slows, although part of the expertise will persist through refurbishment work already underway on existing plants.

Nevertheless, the contrast with solar projects is striking: Flyvbjerg’s database shows that they have almost no overruns. These technologies, naturally modular, quick to deploy, and predictable in cost, must be part of Québec’s toolbox. Developing local expertise in these fields is not a luxury; it is a necessity if we want to manage risks while meeting electrification needs.

How Big Things Get Done reads both as a warning and as a practical guide. Québec built its energy history on hydro megaprojects that set it apart in global statistics. For the future, it will likely need to combine that tradition with the modular spirit of solar and storage. Think slow, act fast—and choose the right tools for the big things to come.

Energy in the Magdalen Islands: between local realities and global transitions

I recently returned from a stay in the Magdalen Islands in the Gulf of St. Lawrence. Behind the beauty of the landscapes lies a unique energy reality: both pragmatic and fragile.

(LinkedIn: https://www.linkedin.com/pulse/energy-magdalen-islands-between-local-realities-global-benoit-marcoux-ox1ee/)

A beautiful yet fragile archipelago

Energy on the Islands is still dominated by fossil fuels: diesel for boats and trucks, gasoline for cars, large marine diesel engines for the Cap-aux-Meules power plant, and heating oil for homes.

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Photos: Ferry; Heating oil tank; Fuel tanks; Port of Cap-aux-Meules

Two wind turbines punctuate the landscape. They symbolize a willingness to diversify, but also local resistance to change perceived as imposed “from the mainland”. Unlike Prince Edward Island, which I passed on the way to the ferry, I saw no solar panels in the Magdalen Islands. On PEI, solar panels are already visible in the landscape and part of everyday life, accentuating the contrast.

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Enercon E126 EP3 wind turbine and my campervan to have a sense of scale

A local economy anchored in diesel

The Cap-aux-Meules plant runs on large 12 MW marine diesel engines. These are the same types of engines found in many power plants across Africa and other remote regions of the world: reliable, robust, but rigid. They cannot easily adjust to variations in wind power.

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Cap-aux-Meules power plant

Maintaining them requires specialized mechanics, often trained in maritime trades. These stable jobs are essential in a local economy marked by the seasonality of tourism and fishing. Replacing diesel with renewables does not recreate the same job base. And that is the core dilemma: energy transition is not just about replacing megawatts, it must also work with existing economic and social structures.

Between renewables and network rigidity

Integrating renewables runs up against this reality. The two existing turbines produce electricity, but their contribution is constrained by the inflexible thermal fleet. The absence of residential or commercial solar reinforces the impression of a system locked in its traditional model, despite potential and inspiring examples elsewhere.

Hydro-Québec’s plan (June 2025)

Hydro-Québec recently announced a strategy to reshape the Islands’ energy supply:

  • A new 16.8 MW wind farm on Grosse-Île, expected to cut diesel use by 40%.
  • A residential and commercial solar program starting in 2026 (covering up to 50% of installation costs).
  • A new low-carbon fuel power plant by 2035, designed to maintain local jobs.
  • A $70M efficiency program, including widespread deployment of heat pumps.

This plan addresses social and technical constraints, but it isn’t very innovative. One might have hoped for more: experiments with storage, pilot microgrids, or bolder solutions like those seen in other islands.

Transport and heating: small but concrete steps

I saw a few electric cars. Like heat pumps, each replacement reduces imported fuel consumption and emissions, even if the electricity still comes mainly from fossil fuels. In a temperate climate, the efficiency gains are significant.

The Orkney contrast

Across the Atlantic, the Orkney Islands (Scotland) chose a different path: go big on renewables (wind, tidal, solar), then invent solutions to balance the grid with storage and green hydrogen. In the Magdalen Islands, the approach remains cautious and traditional: secure energy with a thermal base, and gradually add renewables. Two opposite logics, both valid in their respective contexts.

Madelinots facing climate change

Residents don’t need theory: they already live with climate impacts. Coastal erosion is everywhere, entire homes are protected by rock armouring, and the disappearance of sea ice worsens winter storms. Their carbon footprint is tiny, but their vulnerability immense.

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Houses protected by a rock wall

A universal contrast: pragmatism vs idealism

This contrast between pragmatism (Michael Liebreich) and idealism (Greta Thunberg) is not unique to the Islands. It is found everywhere the transition threatens established practices or entrenched orders. Think of Alberta: facing climate-driven wildfires, yet still dependent on oil exploitation.

Conclusion – Politics as the art of the possible

From the mainland, the contradictions seem obvious: acknowledging climate change while relying on diesel. But the Islands’ energy transition must be built with, and for, their residents.

Hydro-Québec’s strategy charts a pragmatic course: diversify supply, cut emissions, and preserve local jobs. Yet for a territory so exposed and symbolic, perhaps more boldness was needed.

Énergie aux Îles-de-la-Madeleine : entre réalité locale et transitions globales

Je reviens d’un séjour aux Îles-de-la-Madeleine, dans le golfe du St-Laurent. Derrière la beauté des paysages, on découvre une réalité énergétique unique, à la fois pragmatique et fragile.

(LinkedIn : https://www.linkedin.com/pulse/energy-magdalen-islands-between-local-realities-global-benoit-marcoux-ox1ee/)

Un archipel beau et fragile

L’énergie aux Îles est encore dominée par les combustibles fossiles : diesel pour les bateaux et les camions, et essence pour les voitures, gros moteurs maritimes pour la centrale thermique de Cap-aux-Meules, mazout pour le chauffage.

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Photos: traversier; réservoir de mazout; réservoirs de carburant; port de Cap-aux-Meules.

Deux éoliennes ponctuent le paysage. Elles symbolisent une volonté de diversification, mais aussi les résistances locales face à un changement perçu comme imposé « du continent ». Contrairement à l’Île-du-Prince-Édouard, visitée sur le chemin du traversier, je n’ai vu aucun panneau solaire aux Îles. Sur l’Î.-P.-É., les panneaux sont déjà visibles dans le paysage et intégrés dans la vie quotidienne, ce qui accentue le contraste.

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Éolienne Enercon E126 EP3 et mon campeur pour donner l’échelle

Une économie locale ancrée dans le diesel

La centrale de Cap-aux-Meules fonctionne avec de gros moteurs diesel maritimes de 12 MW. Ce sont les mêmes types de moteurs que l’on retrouve dans de nombreuses centrales en Afrique ou dans d’autres régions isolées du monde : fiables, robustes, mais rigides. Ils ne peuvent pas s’ajuster rapidement aux variations de l’éolien.

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Centrale de Cap-aux-Meules

Leur entretien mobilise des mécaniciens spécialisés, souvent formés dans le milieu maritime. Ces emplois stables sont essentiels dans une économie locale marquée par la saisonnalité du tourisme et de la pêche. Remplacer le diesel par des énergies renouvelables ne recrée pas le même tissu d’emplois. Et c’est là tout le dilemme : la transition énergétique ne se limite pas à remplacer des mégawatts, elle doit aussi composer avec les structures économiques et sociales existantes.

Entre renouvelables et rigidité du réseau

L’intégration des énergies renouvelables se heurte directement à cette réalité. Les deux éoliennes actuelles produisent de l’électricité, mais leur contribution est limitée par la rigidité du parc thermique. L’absence de solaire résidentiel ou commercial renforce cette impression d’un système qui reste enfermé dans son modèle traditionnel, malgré le potentiel et les exemples inspirants observés ailleurs.

Le plan d’Hydro-Québec (juin 2025)

Hydro-Québec a récemment annoncé une stratégie pour transformer l’approvisionnement énergétique des Îles :

  • Un nouveau parc éolien de 16,8 MW à Grosse-Île, qui réduira de 40 % la consommation de diesel.
  • Un programme solaire résidentiel et commercial dès 2026 (jusqu’à 50 % du coût couvert).
  • Une nouvelle centrale à carburant à faible intensité en carbone d’ici 2035 pour maintenir des emplois locaux.
  • Un programme d’efficacité énergétique de 70 M$, incluant le déploiement massif de thermopompes.

Ce plan répond aux contraintes sociales et techniques, mais il n’est pas très innovant. On aurait pu espérer davantage : expérimentations avec le stockage, projets pilotes de microgrids hybrides, solutions plus audacieuses, comme on en voit dans d’autres îles.

Transport et chauffage : de petits pas concrets

J’ai vu quelques voitures électriques. Comme pour les thermopompes, chaque remplacement réduit la consommation de carburant importé et les émissions, malgré l’électricité de source fossile, surtout dans un climat tempéré qui maximise les gains d’efficacité.

Le contraste avec les Orkney

À l’autre bout de l’Atlantique, les îles Orkney (Écosse) ont pris une voie différente : miser massivement sur le renouvelable (éolien, marée, solaire), puis inventer des solutions pour équilibrer le réseau avec du stockage et de l’hydrogène vert. Aux Îles-de-la-Madeleine, l’approche reste prudente et traditionnelle : sécuriser l’énergie avec une base thermique, et intégrer progressivement des renouvelables. Deux logiques opposées, toutes deux légitimes selon les contextes.

Les Madelinots face aux changements climatiques

Les habitants n’ont pas besoin d’explications théoriques : ils vivent déjà les effets du climat. L’érosion côtière est visible partout, des maisons entières sont protégées par des enrochements artificiels, et la disparition du couvert de glace aggrave les tempêtes hivernales. Leur empreinte carbone est minuscule, mais leur vulnérabilité est immense.

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Maisons protégées par enrochement

Un contraste universel : pragmatisme vs idéalisme

Ce contraste entre pragmatisme (à la Michael Liebreich) et idéalisme (à la Greta Thunberg) n’est pas exclusif aux Îles. On le retrouve partout où la transition menace les façons de faire ou l’ordre établi. Pensons à l’Alberta : confrontée aux feux de forêt liés au climat, mais toujours dépendante de l’exploitation pétrolière.

Conclusion – La politique est l’art du possible

Vues du continent, les contradictions semblent évidentes : reconnaître les changements climatiques tout en continuant à dépendre du diesel. Mais la transition énergétique des Îles doit se construire avec et pour leurs habitants.

La stratégie d’Hydro-Québec trace une voie pragmatique : diversifier les sources, réduire les GES, tout en préservant l’économie locale. Mais pour un territoire aussi exposé et symbolique, on aurait peut-être aimé plus d’audace.